Diesel : la triple peine sanitaire, sociale et économique

La France et les français n’ont pas fini de payer le coût très élevé de notre addiction au diesel.

On connaissait déjà le coût sanitaire extrêmement important de la pollution de l’air par les particules fines dues au diesel : plusieurs dizaines de milliers de morts chaque année, une durée de vie écourtée de 6 à 9 mois pour chaque citadin, comme l’a confirmé en 2011 l’étude Aphékom, qui tentait même d’en chiffrer l’impact économique à 31,5 milliards d’euros en Europe.

On savait depuis quelques mois qu’à ce coût sanitaire allait s’ajouter une condamnation de la France par la Cour de Justice Européenne, pour non respect des directives de qualité de l’air, et l’amende afférente. En conséquence, l’Etat français tente depuis, tant bien que mal, de donner le change (plan particules, Zapa, etc.) afin de réduire l’usage des véhicules les plus polluants – mais sans s’attaquer à la source du problème – par des mesures dont l’impact social risque de peser prioritairement sur les ménages déjà les plus en difficulté, possesseurs de vieux véhicules.

A cette double peine sanitaire et sociale, s’ajoute la confirmation d’une troisième peine, économique celle-là, par la Direction générale des douanes et des droits indirects, qui indique que la très forte diésélisation du parc automobile français (le gazole représentant 80% de la consommation de carburant) se traduit par une envolée des importations, se soldant en 2011 par un déficit de 13 milliards d’euros (contre 2,4 en 2002) !

Cette triple malédiction n’est pas tombée sur la tête des Français par hasard : elle est le résultat d’une politique fiscale délibérée, depuis des décennies, visant à favoriser le gazole, et par conséquent le constructeur automobile français de véhicules diesel. Gouvernements de droite et de gauche n’ont eu de cesse de s’obstiner dans cette impasse malgré les alertes des médecins et des écologistes. A un scandale sanitaire et environnemental sont venues s’ajouter  l’injustice sociale et l’aberration économique.

Il est plus que temps de redresser la barre et de s’attaquer non plus aux symptômes mais aux causes de cette crise sanitaire, sociale et économique. Il convient de reconnaître que la diésélisation du parc automobile français est un lourd handicap et de supprimer toutes les incitations à “acheter diesel”, à commencer par la suppression des avantages fiscaux du carburant, à l’intégration du critère “pollution aux particules” dans le bonus / malus, etc. tout en mettant en place des alternatives de mobilité (transports collectifs, petits véhicules peu polluants, etc.).

Cette mutation ne pourra s’opérer que progressivement, tant la situation n’a fait qu’empirer par conservatisme des politiques et constructeurs. Raison de plus pour ne plus attendre.

Denis Baupin